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Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/50

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voulu faire juge de leur différent, mais elle, tout à coup frappant les mains sur les deux costés de sa robbe qu’ils tenoient, la leur faisoit lascher, et puis s’enfuyoit jusques à ce qu’ils l’eussent attainte. Et n’eust esté que quelquesfois ils se jettoient à genoux devant elle, d’autresfois luy baisoient les mains avec soubmission pour la retenir, on eust jugé à sa fuite, qu’il luy vouloient faire quelque force.

Et pour ce qu’ils s’approchoient du carrefour sans se prendre garde de la bonne compagnie qui y estoit, Leonide les monstra à toute la trouppe, pour sc,avoir si i y avoit personne qui les recognust. – Je les ay veu bien souvent, respondit Lycidas, ils se tiennent dans le hameau plus proche de Mont-verdun, encores qu’ils ne soyent pas originaires de ce lieu-là, mais estrangers que la fortune de leurs peres a contrainct de se venir loger en ceste contrée ; et si vous vistes jamais une beauté naissante, donner une grand esperance de perfection, il faut que vous voyez le visage de la bergere. Que si vous pouvez faire en sorte qu’ils vous racontent le different qui est entr’eux, je m’asseure que vous passerez agréablement le reste du jour, car ils sont tous deux amoureux de ceste bergere, et elle, qui est offencée contre tous deux ne veut ny de l’un ni de l’autre. Je me rencontray il y a quelque temps de l’autre costé de Lignon, en lieu où j’ouys de leur