Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/516

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Lettre D’Astrêe à Celadon .

Que vous m’aymiez, je le croy, et vous le pouvez cognoistre en ce que j’ay agreable que vous m’en asseuriez. Que si vous aviez autant de cognoissance que de ressentiment d’amour, par la permission que je vous donne de me dire que vous m’aymez, vous jugeriez que je vous ayme, et par là vous seriez asseuré que vous avez de moy ce qu’il semble que vous souhaittez seulement pour estre bien-heureux. Si apres ceste declaration vous n’estes content, je diray que vous n’aymez point Astrée, puis que l’amitié ne doit rien desirer que l’amitié.

Quand Leonide, lisant ceste lettre, rencontra le nom d’Astrée, elle s’arresta tout court, et approchant le papier de ses yeux, releut deux ou trois fois ce mot. En fin se ressouvenant de la jalousie qui avoit esté entre Celadon, Lycidas, Astrée et Phillis, elle creut que peut-estre n’estoit-elle pas mal. fondée et qu’en effect Astrée pouvoit bien avoir aymé Lycidas ; et pour ce, la repliant, la mit en son sein, et en prit une autre qu’elle trouva telle.