Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/519

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lettre, sans sçavoir presque ce qu’elle lisoit, parce que se representant le berger à qui elle avoit pris ce petit sac, et se ressouvenant d’en avoir ouy dire quelque chose à Galathée, lors que Celadon fut trouvé sur le bord de Lignon, elle entra en quelque opinion que ce fust luy, et non pas Lycidas. Et lors, considerant de plus, prés ces papiers, elle s’en asseura d’avantage quand elle vid quelques uns qui monstroient d’avoir esté mouillez ; mais beaucoup plus encores, lors que regardant le sac, elle trouva que le cuir s’estoit retiré et ridé en certains lieux, car elle reconnut par là que veritablement c’estoit cestuy-cy dont Galathée luy avoit parlé. O dieux, dit-elle, frappant des mains ensemble, il n’en faut point douter. : c’est Celadon. Mais où avois-je les yeux que je ne l’ay pas connu quand je l’ay veu ?

Et lors ramassant en diligence tous ces papiers, elle les resserre et s’en retourne bien plus viste à la fontaine où elle l’avoit laissé, qu’elle n’en estoit pas venue. Mais elle fut bien faschée de ne l’y trouver plus. Ah ! fontaine, disoit-elle, et vous sejour solitaire, rendez-moy ce que je vous ay laissé ! Rendez-le moy, ce berger, duquel ne voulant interrompre le repos, j’ay perdu entierement le mien !

En proferant ces parolles, elle alloit tournant la veue tout à l’entour, pour voir si elle en pouvoit apprendre quelque nouvelle. Mais elle n’avoit garde,