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Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/542

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qui venoient de l’armée des Francs, il y avoit tousjours tant de choses à l’avantage de Lindamor, quel’onparloit plus de luy presque que de tout le reste, et que cela estoit cause qu’il s’acqueroit merveilleusement la voix de chascun, et qu’au contraire on le tenoit presque pour un faineant, de sorte qu’il sembloit que la gloire de son rival diminuast la sienne d’autant. Mais ce qui luy faschoit le plus, c’estoit que la ruze de Climanthe, dont je vous ay autresfois parlé, n’avoit rien fait à son advantage ; et ne sçachant pas ce qui en estoit advenu, il estoit le plus confus homme du monde. Toutesfois encor qu’il vist tous les jours la nymphe et qu’il I’entretinst bien souvent, si n’osa-t’il luy en faire jamais semblant ; tant s’en faut, une fois que Galathée luy en parla pour esprouver si ce que je luy avois dit de la ruze de Polemas et de Climanthe estoit veritable, il feignit de sorte de n’en sçavoir rien, que la nymphe perdit tout à faict le doute où je I’avois mise, m’accusant en son ame d’avoir inventé cette menterie à l’advantage de Lindamor, ainsi que j’ay sceu depuis par le rapport de Silvie, à qui la nymphe racontoit toutes ces choses.

Cependant je passois une vie qui n’estoit point desagreable, si j’eusse eu le bien que j’ay maintenant de vous voir. Car, Celadon, il faut que vous sçachiez que Paris est tellement devenu