Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/583

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pour les merites du berger ; mais, depuis la responce de l’Oracle, il y fut bien davantage poussé pour son propre sujet, faisant bien paroistre combien une personne intéressée s’employé plus soigneusement que celle qui n’est touchée que du devoir. Prenant donc le chemin de Lignon, il s’enquit du lieu où Celadon estoit, et elle luy ayant monstre l’endroit, il creut estre à propos de regagner le pont de la Bouteresse ; et prenant le mesme sentier par où elle y avoit esté conduite sans y penser, elle luy monstra la fontaine où elle l’avoit rencontré, et en fin le buisson qui couvroit le rocher où il demeuroit. Et parce qu’ils eurent peur que s’il les appercevoit, il ne s’enfuist, ils s’en approcherent le plus doucement qu’il leur fut possible pour le surprendre. Et de fortune il estoit couché à l’entrée de sa caverne si pres de la riviere, que la considerant appuye sur un coude, les larmes que ses pensees luy arrachoient du cœur, tomboient dedans, et se mesloient parmy son onde. Et lors qu’ils arriverent, il reprit ainsi la parole.

Sonnet II