Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/627

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qu’il a recherchée, s’il n’y a point eu d’autre occasion de haine que son amour, tant ceste recherche et ce desir de plaire rend agreables ceux qui ont dessein de se faire aymer. Que si cela advient en general à tous, à plus forte raison à Silvandre, de qui le corps n’est point si desagreable que la beauté de l’esprit ne puisse aisément suppléer à tous ces defaux. Et quant à ce qui est de l’humeur de Diane, l’amitié qu’elle a portée à Filandre est une preuve certaine qu’elle n’a pas tous-jours esté insensible à l’amour. Et qui peut empescher que ce qui luy est arrivé une fois ne luy advienne encor une autre ? Quant à moy, je crois qu’amour n’a pas oublié l’adresse dont il usa la premiere fois qu’elle fut blessée et que Silvandre peut bien avoir la mesme fortune que Filandre a eue. – C’est pour-quoy (respondit Astrée en luy serrant la main) je tiens pour chose impossible que jamais Diane se laisse reprendre à l’Amour. Et en cela, nous sommes vous et moy de differente opinion ; car je croy que fort aysément une fille qui n’a jamais rien aymé se laissera emporter à ces douces flateries, mais du tout impossible, selon mon humeur, qu’une personne advisée ayant aymé et perdu la personne aymée, puisse jamais plus laisser prendre racine à un autre amour dans son ame. Et me semble que pour cette occasion le cyprez seroit un bon symbole de mon amitié, puisque s’estant coupé