Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/637

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

de celuy qui estoit à genoux, et les apprehensions de celuy qui les regardoit, prindrent volonté de sçavoir d’avantage de leurs affaires. Et pource, en attendant qu’Astrée revinst, ils s’en approcherent le plus qu’ils peurent sans en estre veus, et lors ils ouvrent que ce berger, apres un grand souspir, reprenoit la parole de ceste sorte : Est-il possible, bergere, que vous n’ayez jamais agreable ny la volonté que j’ay de vous servir, ny la contrainte que vous me faites de vous aymer. – Je ne sçay, respondit-elle desdaigneusement, ny quelle est ceste volonté, ny quelle est ceste contrainte dont vous me parlez, mais je sçay bien que venant de vous, ny l’un ny l’autre ne m’en sçauroit plaire. – Que vous ne sçachiez point, repliqua le berger, ny quelles sont vos chaines, ny quelle est ma servitude, cela ne me remet pas en liberté, mais que vous ne les ayez point agreables, d’autant qu’elles me touchent, c’est bien le plus grand mal qui me puisse arriver. – Si la coustume, dit la bergere, rend toutes choses, pour difficiles qu’elles soient, aisées à supporter, vous ne devez pas beaucoup ressentir le mal que vous dites, puisque il y a si long temps que vous y devez estre accoustumé. Car dés l’heure que vous me declarastes vostre volonté, je vous fis entendre la mienne si franchement que vous en sceustes autant la premiere fois que vous en avez jamais sceu depuis, ny que vous en sçaurez jamais. –