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Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/653

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puis qu’ainsi sans raison, il estoit jaloux de luy. Il s’adresse donc à Phillis, et la veut prendre sous les bras, mais elle qui voyoit bien l’œil de Lycidas, fit un tour entier pour l’eviter, feignant que ce fust pour appeller quelqu’une de ses compagnes. Mais Silvandre s’opiniastrant, fit le tour aussi bien qu’elle. Phillis n’osoit le refuser tout ouvertement, de peur que cfeux qui le verroient ne le trouvassent mauvais ; aussi ne pouvant souffrir qu’il la prist, elle luy dit : Pensez-vous, Silvandre, que je vous sois fort obligée de ce que vous venez vers moy à faute d’autre  ? Silvandre cogneut bien à quel dessein elle le disoit, mais sans en faire semblant, il s’approcha de son oreille, et feignant de luy parler, se retira incontinent apres, non sans avoir tourné la teste du costé de Lycidas, faisant toutesfois semblant qu’il estoit bien marry qu’il l’eust apperceu.

Ce coup fut un des plus sensibles que Lycidas eust peu recevoir, car il creut, comme il y avoit apparence, que c’estoit à son occasion qu’il s’en retiroit et qu’il y avoit une grande intelligence entre Phillis et le berger. Cela fut cause que ne pouvant suporter ceste y eue, il s’alloit peu à peu retirant. Mais Phillis qui eust bien desiré de se rapointer,