Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/66

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que nous luy donnions, luy fissent aucun effect, de fortune un vieux mire de mes amis, scachant le déplaisir que j’avois de la perte de Calidon, me vint trouver pour, avec ses sages propos, me consoler en cette cuisante affliction ; et, apres qu’il m’eust representé toutes les considerations que la prudence humaine eust peu faire. En fin, me dit-il, resignez Calidon, et vostre volonté entre les mains de Tautates, et croyez, si vous le faites sans feintise, que vous en recevrez plus d’ayde et de soulagement que vous n’en sçauriez esperer de tous les hommes. Et lors qu’il fut prest à artir, il voulut voir Calidon.

Nous allasmes donc tous deux en sa chambre, où il luy parla quelque temps, et le considera fort longuement ; il remarqua ses gestes, ses actions, luy toucha le pouls, le tourna de tous costez pour recognoistre son mal, et apres avoir demeuré plus de deux heures aupres de luy : Mon enfant, luy dit-il, resjouyssez-vous, et soyez certain que vous ne mourrez pas encores de cette maladie, et que j’en ay veu plusieurs attaints de mesme mal, mais je n’en vis encor jamais mourir un seul.

En sortant hors de la chambre il me tira à part, et me tint ces propos : L’âge que j’ay vescu, encor que je ne l’aye pas tout bien employé, si est-ce qu’il ne m’a pas entierement esté inutile, si j’ay