Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/706

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nous ostons quelqu’une de ces parties, ce n’est plus amour, et croy qu’il n’y a personne en la compagnie, si ce n’est Hylas, qui ne l’advoue. – Et que sera-ce donc ? dit Hylas ? – Ce sera, respondit Silvandre, le contraire d’amour ; car si l’exremité deffaut à l’affection, telle affection n’appartient non plus à l’amour que le froid au chaud, et si la fidelité manque à l’extreme affection, c’est une trahison, et non pas une amour. Que si la fidelité y est non pas continuée ou pour mieux dire, perpetuelle, ce n’est pas fidelité, mais perfidie. Voyez donc, Hylas, et confessez que j’ay eu raison de dire, que qui n’avoit qu’une partie d’amour n’en avoit rien du tout. Que s’il est vray que l’amour soit quelque chose d’indivisible, comme eust-il esté raisonnable d’ordonner à Doris qu’elle la divisast pour Palemon et pour Adraste ?

A la fin de ses parolles, Paris reprit ainsi froidement : Il me semble, Hylas, que nous avons la raison de nostre costé, mais que Silvandre par ses discours s’acquiert l’opinion de toute la troupe qui le favorise ; et faut que je confesse que si vous ne luy respondez, je me sens presque contrainct d’advouer ce qu’il dict. – Gentil Paris, dict Hylas, quoy que Silvandre en die et quoy que vous en croyez, la verité ne se changera pas ; et quant à moy, je sçay bien que l’experience est plus certaine que