Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/710

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Hylas. N’y a-t’il pas quelque conformité entre nous ? Car, tout ainsi que je ne vaux pas tant qu’un autre ne puisse valoir davantage, aussi n’est-elle pas si belle qu’une autre ne la puisse estre plus. De sorte que je puis dire pour respondre mesme à ce que tu m’as demandé que je te proposasse une plus parfaicte amour que la tienne : que si quelqu’un veut bien aimer, il faut que ce soit comme Hylas, et non pas comme Silvandre. Car à quelle occasion aime-t’on, sinon pour avoir du contentement ? Mais quel plaisir peuvent avoir ces mornes et pensifs amants qui vont continuellement serrez en eux-mesmes, se rongeant l’esprit et le cœur avec cette chimere de constance ? Diane, nous dira Silvandre, ne m’ayme point : elle en aime un autre, et me mesprise ; mais je ne laisseray de l’aimer et de la servir, de peur d’estre dit inconstant. Phillis, nous dira Hylas, ne m’ayme point : elle en ayme un autre, et me mesprise ; pour quoy ne changeray-je cette ingratte et mescognoissante, pour une autre qui m’aymera, et mesprisa quelque autre pour moy ? Sera-ce de peur d’estre taxé d’inconstance ? Ah ! mes amis, dictes-moy quelle beste est-ce que cette inconstance ? Qui a-t’elle devoré ? ou bien quelle maladie cause-t’elle, et qui est-ce qui en est mort ? ou quel frere ou pere a jamais eu occasion d’en porter