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Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/712

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tourna les yeux sur Silvandre pour ouyr ce qu’il diroit. Et luy, pour leur satisfaire, respondit froidement de ceste sorte. Je pensois, madame, devoir parler à un berger, et en presence des dames et des bergeres, mais à ce que je vois, c’est à un de ces orateurs qui haranguent devant les autels de l’Athénée de Lyon, tant Hylas s’est laissé transporter à son bien dire. Si voudrois-je bien toutefois (voyez combien je suis asseuré de la bonté de ma cause) que celuy de nous deux qui sera condamné fust aussi rudement chastié, que ceux qui ont la hardiesse de parler devant ces autels sacrez, que l’on constraint, ayant esté vaincus, d’effacer leur harangue avec la langue, ou d’estre plongez dans le Rosne. – Cela n’est pas raisonnable, interrompit Hylas, et si j’en eusse esté adverty dés le commencement, j’eusse pris des juges qui ne m’eussent point esté suspects, et à tout le hazard j’eusse fait mon discours de moins de paroles, afin pour le moins, de n’avoir pas tant de peine s’il le faloit effacer. – Et comment, dit la nymphe, vous nous jugez suspectes, et pourquoy avez-vous ceste opinion de nous ? – Par ce, dit Hylas, que vous croyez toutes Silvandre comme un oracle, et sous pretexte qu’il a esté quelque temps aux escholes des Massiliens, vous admirez tout ce qu’il dit et vous semble qu’il a toujours raison. – Non, non, Hylas, reprit incontinent Silvandre, ne refuse point le jugement de ceste