Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/729

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comme ces soleils d’hiver qui se levent tard et se couchent à bonne heure, et qui, à la verité, apportent bien le jour, mais avec de si espaisses nuées que la clairté ny la chaleur ne s’en voit ny ne s’en ressent guiere.

Et lors il leur raconta la rencontre qu’il avoit eue de Silvandre, la lattre qu’il luy avoit mise entre les mains, et la venue d’Astrée avec toutes ces bergeres, et comme il l’avoit veue, et luy avoit mis une lettre dans le sein. – Mais helas ! mon pere, continua-t’il, encor que cet heur soit tres-grand pour moy, n’ay-je point occasion de craindre qu’il ne me soit advenu que pour me faire mieux ressentir mes desplairs ? Et que le Ciel, pour me donner plus de regret du miserable estat où je suis, m’ait voulu faire voir celuy où je devrois estre s’il y avoit quelque justice en amour ? – Tant s’en faut, mon enfant, respondit le druide, que ce sage amour dont vous parlez, ayant soin de vous, et desseignant de vous mettre en une fortune plus heureuse que vous n’avez point esté, a voulu vous donner ce petit contentement pour ne vous porter d’une extremité en l’autre, sçachant assez combien tels changements sont dangereux. Et pour vous monstrer que je dis vray, Leonide vous dira ce qu’elle a appris, et quelle declaration d’amitié elle a veu faire à la belle Astrée.