Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/733

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couleur que vous souliez avoir, qu’il n’y a celuy qui n’y soit trompé en vous regardant. Et quoy que la ressemblance qui est entre vous, ne soit pas telle que quand on vous verroit ensemble, on ne recognut bien une grande difference, il n’importe, d’autant qu’il y a si long temps que personne de cette contrée ne l’a veue, que quand vous seriez encor beaucoup moins ressemblants, me l’oyant dire, on ne laissera de vous prendre pour elle. Je ne vois en tout cecy qu’un inconvenient : c’est que tous les ans, nous nous assemblons tous à Dreux, qui est si proche des antres des Carnutes que les vacies et druides sçauront aisé­ment que ma fille n’en est point partie ; mais il ne faut pas s’arrester pour cela, car, comme je vous dis, cette assemblée des druides ne se fait d’une lune et demy, et sont contraints d’y demeurer plus de deux lunes, et Dieu sçait si avant ce terme vous n’aurez repris vos habits et changé de vie ! Or regardez, Celadon, si cela n’est pas bien faisable ? – Ah ! mon pere, respondit le berger, apres y avoir songé quelque temps, et comment enten­dez-vous qu’Astrée, par ce moyen, ne me voye point ? – Pensez-vous, adjousta le druide, qu’elle vous voye, si elle ne vous cognoit ? et comment vous cognoistra-t’elle ainsi revestu ? – Mais, repliqua Celadon, en quelque sorte que je sois revestu, si seray-je en effect Celadon, de sorte que veritablement je