Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/734

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luy desobeiray. – Que vous soyez Celadon, il n’y a point de doute, respondit Adamas, mais ce n’est pas en cela que vous contreviendrez à son ordon­nance, car elle ne vous a pas deffendu d’estre Celadon, mais seullement de luy faire voir ce Celadon. Or.elle ne vous verra pas en vous voyant, mais Alexis. Et par conclusion, si elle ne vous cognoit point, vous ne l’offencerez point ; si elle vous cognoit, et quelle s’en fache, vous n’en devez esperer rien moins que la mort. Et telle fin n’est-elle pas meilleure que de languir de cette sorte ?

– Voylà, dit alors le berger, la meilleure raison, et je m’y veux arrester; et pource, mon pere, je remets entre vos mains et ma vie et mon contentement : disposez donc de moy comme il vous plaira.

Ce fut de ceste sorte qu’Adamas vainquit la premiere opiniastreté de Celadon. Et afin qu’il ne changeast d’advis, il s’en retourna dés l’heure mesme pour donner ordre à ce qui estoit necessaire, et sur tout pour faire courre le bruit du mal de sa fille, et de son retour. Car c’estoit la coustume des filles druides qu’elles sortoient des antres, lors qu’elles estoient malades, et si leurs parents n’estoient songneux de les envoyer querir, les anciennes les leur renvoyoient, d’autant qu’elles tenoient pour un grand malheur, lors qu’il y en mouroit quelqu’une. Et cela fut cause qu’il feignoit que la sienne s’en revenoit par le commandement des an­ciennes, et qu’il l’attendoit de jour