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Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/74

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d’y pourveoir, d’abord il me le nia ; mais en fin avec les larmes aux yeux, il l’advoua, et en mesme temps me demanda pardon, avec tant d’apparence de regret, que sans doubte la cognoissance que j’en eus, fit que je luy remis toute la faute qu’il avoit commise contre moy, voyant bien que s’il avoit erré, ç’avoit esté par force. Mais lors que j’en voulus parler à Celidée, ce fut bien où je trouvay de la difficulté, car non seulement elle ne l’aymoit point, mais le’hayssoit, et falloit bien que ceste inimitié vint de nature, puis qu’il n’y avoit sujet quelconque apparent de luy vouloir mal, les bonnes conditions de ce berger estant telles, qu’elles devoient plustost donner de l’amour que de la hayne. Et toutesfois, bien souvent que nous en avions parlé ensemble, elle m’avoit tousjours dit, que Calidon seroit le dernier qu’elle aymeroit .

Or à ce coup que j’estois resolu de luy faire cette ouverture si contraire à sa volonté et à la mienne, et si differente des discours que je luy avois tousjours tenus, je fus fort en suspens par où je devois commencer. En fin je pensoy qu’il estoit à propos de l’y embarquer peu à peu ; car de luy dire tout à coup qu’elle aimast Calidon, je jugeois bien que je ne l’obtiendrois pas aysément d’elle, tant pour l’amitié qu’elle me portoit, que pour le peu d’inclination qu’elle avoit à l’aymer. J’en usay donc de