Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/752

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à mes desirs t’a conduit en ce lieu escarté pour m’empescher de suivre, si je ne puis comme Ursace, comme son esprit pour le moins, sa tant aymée Eudoxe ? – Ursace, luy dit-il, le dieu qui preside aux amitiez et non point un mauvais demon, est cause que je te cherche depuis trois jours, non pour t’empescher de suivre Eudoxe, si c’est ton contentement, mais pour t’y accompagner, ne voulant souffrir que si ton amour te fait faire ce cruel voyage, mon amitié ayt moins de pouvoir à me faire te tenir compagnie. Et par ainsi, si tu veux achever le des­sein que tu dis, il faut que tu fasses resolution de mettre premiere­ment ce fer que tu tiens en la main, dans l’estomac de ton amy, et puis rouge et fumeux de mon sang, tu pourras executer en toy ce que tu voudras. – Ah ! Olimbre, dit-il, que tu me fais une requeste dont l’effet est’ incompatible avec mon amitié ! penses-tu que ma main pust avoir la force d’offencer l’estomac de l’amy , d’Ursace ? me tiens-tu pour si cruel que je pusse consentir à la mort de celuy de qui la vie m’a tousjours esté plus chere que la mienne propre ? Oste, oste cela de ton esprit ; jamais ceste volonté ne sera en ceste ame qui t’a aymé, et qui ne cessera jamais de t’aimer. Mais si tu as quelque compassion de ma peine, par nostre ancienne et pure amitié, je te conjure, amy, de me laisser sortir de ceste misere où je suis. – Est-il possible, respondit incontinent Olimbre,