Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/755

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à ton ame par ma main, qu’elle-mesme et avec le mesme fer n’ayt chassé la mienne hors de son miserable sejour. Et à ce mot, il cherchoit de l’œil où estoit l’arme que je luy avois ostée, dont me prenant garde : Ne pense, luy dis-je, Ursace, de pouvoir satisfaire avec ce fer à ta cruelle deliberation : le Ciel m’a envoyé icy pour te dire, qu’il n’y a rien au monde de si deses­peré qu’il ne puisse remettre en son premier estat lorsqu’il luy plaira, et pour te deffendre de ne point attenter sur la vie, ny de toy, ny de ton amy, car c’est à luy à qui elle est et non point à vous. Que si tu fais autrement, je t’annonce de la part du grand Dieu, qu’au lieu de suivre ceste Eudoxe que tu desires avec tant de passion, il te releguera dans des obscures tenebres où tant s’en faut que tu ayes jamais ceste veue tant souhaittée, qu’au contraire il ne t’en laissera pas la memoire seulement.

Je vous raconteray, nymphe, dit Alexis, un estrange effect. Olimbre croyant mes paroles, surpris de ravissement, se voulut lever pour se mettre à genoux devant moy, mais la foiblesse l’en empescha, et «seulement me joignit les mains, se tournant de mon costé. Mais Ursace se tournant à mes pieds : O messager, du Ciel ! me dit-il, que je recognois, soit aux discours, soit à Tesclat du visage, me voicy prest : qu’est-ce que tu commandes ? – Ils vous prindrent, interrompit