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Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/756

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Leonide, pour Mercure, parce qu’ils le representent jeune et beau comme vous estes. – II est vray, respondit Alexis, qu’ils me penserent estre Mercure, ou quelque messager celeste, mais je ne sçay pourquoy. Tant y a que pour me prevaloir à leur profit de ceste opinion, je fis telle response à Ursace : Dieu, ô Ursace; te commande, et à toy aussi, Olimbre, de vivre, d’esperer. Et à ce mot, sortant de ma poche un petit cuir plain de vin, à la façon des Vissigots, j’en fis boire un peu à Olimbre, et luy donnant la main, je luy dis : Debout ! Olimbre, le Ciel te guerira bien tost de ceste blesseure, et pour cest effect, allons en ceste bourgade prochaine, car il veut que les graces qu’il fait soient le plus souvent par l’entremise des hommes, afin d’entretenir l’amitié entre eux par ces mutuelles obligations.

Ce fut une chose estrange que l’effect de l’opinion en cet homme, puis que pensant que je feusse envoyé du Ciel, et que le breuvage que je luy avois donné, fust quelque chose de divin, le voilà qui reprit ses forces, et se mit à me suivre, tout ainsi presque que s’il n’eust point eu de mal. Craignant toutesfois que quelque deffaillance ne luy revint, je me tournay vers Ursace, et luy dis : Encor que le Ciel puisse donner telle force à vostre amy, qui luy sera necessaire, si n’est-il point hors de propos, que vous luy aydiez à marcher. Car Dieu se plaist, d’autant qu’il est bon,