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Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/760

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la vie de deux fidelles servi­teurs. Et quoy que par la premiere opinion que j’avois eue de vous, je me feusse incontinent figuré des assistances extraordinaires du Ciel, je n’en veux pas pour cela perdre l’esperance entierement, puis que par la rencontre que nous avons faite de vous, il est impossible de nier que ce soit un soin particulier que quelque grand dieu, ou grand demon pour le moins, a de la conservation de nostre vie. – N’en doutez point, luy dis-je, ny que vous ne soyez reservez à quelque meilleure fortune, puis qu’ils vous ont retirez d’un danger si apparent, car ils ne font jamais rien que pour nostre mieux. Et parce que je suis estranger, et du tout ignorant de la fortune que vous regrettez, ce me seroit un grand plaisir de l’ouyr de vostre bouche, à fin que je sceusse pour le moins, pour qui les dieux m’ont faict vivre ceste journée. Alors avec un grand souspir, il me respondit de ceste sorte : Le Ciel me puniroit avec raison, comme un ingrat, si je refusois à celuy qui m’a conservé la vie, de luy raconter quel en a esté le cours et l’entresuitte. Et pour ce, je satisferayà vostre curiosité, avec promesse toutesfois que vous tiendrez secret ce que je vous en diray ; car estant descouvert, il pourroit estre cause de la perte de ceste vie, que nous pouvons dire que vous nous avez conservée. Et