Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/773

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qui m’en defferoit, m’obligerait infiniment ; car je sçay bien qu’ils ne laisseront jamais en paix Celadon aupres de moy. C’est pourquoy je voudrais bien essayer de me despecher de l’un par le moyen de l’autre, ce que nous pouvons faire par l’entremise de Leonide, à laquelle il faut que vous conseillez qu’elle doit advertir Lindamor de tout ce qu’elle dict de Climanthe et de luy. Mais qu’elle se garde bien d’y embrouiller Celadon, et vous luy pourrez dire, afin de luy en oster la volonté, que je n’ay plus de memoire de luy, et que la presence de Lindamor qui est chevalier de tant de merites me fera bien oublier ce berger entierement ; parce que ou Lindamor me deffera de Polemas, ou cestuy-cy de l’autre, et par ainsi j’en seray deschargée à moitié, et peut-estre du tout si ma fortune veut qu’en mesme temps l’un me defface de l’autre Je ne voudrois pas que ce fust par leur mort, mais plustost par quelque autre moyen, et toutesfois je me sens si fort importunée d’eux, et j’ayme de sorte Celadon, que s’il ne se peut autrement, j’y consentiray, pourveu que je n’y mette-point la main, et que l’on ne sçache que cela vienne de moy.

J’advoue, ma sœur, qu’oyant ces paroles, je demeuray estonnée, et me resolus de vous en advertir, non pas pour vous don­ner volonté de faire ce qu’elle dict,