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Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/785

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aimoit mieux supporter ceste peine en particulier, que d’estre la fable de toute la cour. Qu’une fille n’avoit rien de si cher que la reputation, et que les soupçons que vous aviez d’elle depuis quelques lunes, l’offençoient de sorte qu’elle donnoit à parler à chacun à son desadvantage. Qu’elle rechercherait tousjours l’honneur de vos bonnes graces par tous les services qu’elle vous pourroit rendre, mais elle vous supplioit tres-humblement de trouver bon qu’elle ne revinst plus. Et à ceste fois que je luy en ay parlé, elle m’a fait encores la mesme responce, et a adjousté tant de sermens, que ce qu’elle vous avoit dit de Polemas et de Climanthe estoit veritable, qu’il faut que j’advoue que j’en crois quelque chose. – Pensez-vous, dit Galathée, que cela puisse estre ? – Madame, respondit Silvie, je n’y vois rien d’impossible, car il est bien cer­tain que Polemas vous ayme et qu’il a bien assez de finesse pour inventer cet artifice. Et ce qui me le fait mieux croire, c’est que le jour que vous trouvastes Celadon, Polemas fut veu tout seul au mesme lieu, s’y promenant fort long temps, et monstrant bien qu’il y avoit quelque dessein. – Et comment le sçavez-vous ? dit la nymphe. – Je l’ay appris, dit Silvie, de plusieurs personnes, parce que depuis que ma compagne m’eut raconté ce qu’elle vous en avoit dit, et voyant la doubte en quoy vous en estiez, je fus curieuse