Aller au contenu

Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/802

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée


Mais si je meurs, je ne pers pas
Le souvenir qui me tourmente :
Au creux de ma tombe relente,
Ce regret suivra mon trespas.

Quelle fortuen pitoyable
Me contraint Amour de courir,
Puis que pour n’estre miserable,
Je ne puis vivre ny mourir ?

Thamire l’escoutant en prit une compassion qui ne fut pas petite, et plus encores lors qu’apres ces paroles il luy vit tendre les yeux en haut, et joindre les mains dans son giron, couvrant son visage de larmes, qui luy empechoient de parler. Il se retira doucement, et s’addressant à Celidée, luy dit l’estat en quoy il l’avoit trouvé, et la pria de parler à luy, et luy donner quelque consolation. La bergere qui estoit bien aise d’obeir à Thamire, et qui faisoit dessein de n’avoir point les mauvaises graces de Calidon, puis qu’elle devoit vivre avec son oncle, s’y en alla aussi tost que Thamire le luy eut dit, et le trouvant en cet estat : Et quoy, luy dit-elle, berger, serez-vous le seul qui ne danserez point ? – A la verité, respondit-il, en luy tendant la main, vous avez raison, belle Celidée, de me faire cette demande, car c’est bien à mes despens que ce bal se fait.