Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/814

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

vous demande autre faveur, sinon qu’il me soit permis de me plaindre, voire de crier quand la douleur du mal me pressera. – Non, non, dit Celidée, d’une parole proferée avec violence, ne vous mettez plus en peine, ny les uns ny les autres. Le grand dieu Tharamis vient de m’inspirer secrettement un moyen pour vous mettre tous en repos d’esprit. Il n’est pas raisonnable, Thamire, que tes peines et tes remonstrances demeurent plus long-temps sans nul effect ; mais il ne faut pas que nous contrevenions à la volonté de Teutates, ny que l’affection que tu m’as portée, soit inutile, non plus que l’amitié que dés le berceau je t’ay eue. Et toy aussi, Calidon, il ne faut pas que tu te consommes toute ta vie de ceste sorte ; vivez tous deux contents, et me donnez loisir seulement de quatre ou cinq nuicts, et vous verrez que le Ciel m’a mis en l’ame un moyen pour vous sortir tous deux de peine.

A ce mot elle reprit ses habits, et pria Thamire de trouver bon qu’elle ne couchast point de trois ou quatre nuicts auprés de luy, afin qu’elle peust achever ce qu’elle avoit desseigné.

Thamire qui commençoit de ressentir la douleur de sa playe et qui outre cela eust consenty à sa mort pour sauver la vie à Calidon, luy accorda librement sa demande, et apres quelques autres propos sur ce subject, les mires qui virent que l’esperance que Celidée leur avoit donnée, leur rapportoit quelque sorte de repos, conseillerent