Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/833

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vie, la moindre partie du contentement que sa laideur luy a rapporté depuis dix ou douze nuicts.

– Vous m’avez raconté, dit Leonide, la plus genereuse, et la plus louable action que jamais fille ait faite, et suis bien aise que ceste belle et vertueuse resolution soit partie d’une personne qui m’est proche, comme j’ay sceu que m’est Celidée, estant niece de Cleontine. Dieu la rende aussi contente avec Thamire, que Thamire a d’occasion de l’aimer, et d’estimer sa vertu. – Or, continua Lycidas, Thamire qui croit de n’avoir point d’enfans, veut faire marier Calidon avec Astrée et pour y convier Phocion, offre de luy donner tous ses trouppeaux et tous ses pasturages. Astrée qui a fait resolution de n’aimer jamais rien, pour le regret qu’elle a de la mort de Celadon, n’y veut consentir en sorte quelconque, et quand son oncle luy en parle, elle ne fait que pleurer, et lors qu’il la presse, elle respond, qu’elle veut passer sa vie parmy les vestales et druides, et pour ce subjet m’a prié d’en parler secrettement à la venerable Chrisante. – Et pensez-vous, adjousta Leonide, que Chrisante la vueille recevoir sans le consentement de ses parents ? – Je luy ay fait ceste mesme oposition, dit-il, quand elle m’en a parlé, mais elle m’a respondu que n’ayant ny pere ny mere, il n’y avoit pas apparence qu’elle en fist difficulté, et que si ceste voye luy estoit refusée, elle prendroit celle du