Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/843

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qui se voyent soustenues en leur colere, de s’animer d’avantage contre le berger: Il se soucie fort peu, dit-elle, de m’offencer ; mais il a raison, car aussi bien ne me sçauroit-il donner plus de volonté de luy faire desplaisir que j’en ay. Dieu sçait si j’estois marri de ceste dissention ! Et toutesfois encor me fascha-t’il de voir le mespris don il usoit envers elle.

Et attendant la fin de ceste rencontre, j’ouys que Silvandre, s’addressant à la bergere Astrée: Et vous aussi, belle bergere, dit-il, vous estes en colere contre moy ? et je pensois que vous tinssiez mon party ? – Je ne suis jamais contre la raison quand je la puis cognoistre, respondit Astrée, et me semble que vous feriez mieux de ne donner point d’avantage d’occasion de haine à ma compagne, et de vous souvenir qu’encor qu’elle ne puisse pas beaucoup, qu’il n’y a point toutesfois de petit ennemy. – Vrayement, respondit alors le berger, laissant tout jeu à part, encore que vous soyez si partialle pour Phillis, je veux bien que vous soyez juge de nostre different, pourveu qu’elle vueille me dire devant vous quelle occasion elle a de se douloir de moy ; et quand vous nous aurez ouys tous deux, je me sousmets dés à cette heure, à telle punition qu’il vous plaira. – Moy ? dit Phillis, que j’entre jamais en raison avec vous ? j’aymerois mieux ne parler de ma vie. Mais sçavez-vous que je desire ? C’est que vous fassiez estat, que je ne suis