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Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/906

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commencement par les plus douces voyes qu’elle put; mais en fin la rejettant plus rigoureusement peut-estre que la qualité de Valentinian ne meritoit pas. Et quoy qu’il s’y voulut opiniastrer, si traitta-t-elle de sorte avec luy qu’elle le contraignit de s’en retirer en apparence, parce qu’elle luy jura que s’il continuoit, elle le declareroit à Theodose et à Placidie. Ce jeune prince qui ne vouloit point desplaire à l’empereur ny à sa mere, cacha si bien ses desirs que personne ne s’en print garde, que Eudoxe et moy, comme je vous diray.

Cependant mon affection alloit croissant sans que ceste jeune princesse s’en apperceust. Tant que ma jeunesse fut telle qu’il m’estoit permis de la voir sans soupçon, jamais je n’en perdis une commodité, me rendant si soigneux pres de sa personne qu’elle estoit contrainte de se servir plus souvent de moy que de nul autre de mes compagnons. Et quoy qu’en ce temps-là je ne sceusse presque que c’estoit que l’amour, si ne laissois-je d’avoir un tres grand plaisir d’estre aupres d’elle, de la servir, d’en recevoir les commandemens, de baiser (lors qu’elle me tendoit quelque chose) l’endroit que sa main avoit touché, ce qu’elle ne voyoit point, ou si elle le voyoit, elle l’attribuoit à civilité.

Je me souviens qu’en ce temps-là, elle se promenoit un jour dans une gallerie, où il y avoit quantité de belles et rares peintures qu’elle alloit considerant. Entre les autres elle vit un