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Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/926

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opinion ?

Je ne pus luy respondre, voyant comme elle le prenoit, mais avec un grand souspir je m’abouchay sur son giron, tenant sa main contre ma bouche. Elle qui recogneust bien ma peine, me mit l’autre main sur la teste, et passoit ses doigts dans mes cheveux. et sans me dire mot, sembloit d’attendre ce que je luy respondrois. En fin me levant, je luy respondis: J’advoue, ma belle princesse, que je vous ayme plus que vous ne voulez, et plus encores que la raison ne veut, mais qui pourroit vous aymer moins que cela ? Je confesse qu’il n’y a raison ny devoir qui puisse mesurer la grandeur de mon affection, et si je vous offence en cela, pardonnez-moy en considerant que ce seroit profaner vostre beauté que de l’aymer moins, et plaignez-moy, qui ayant eu tant de courage me suis trouvé avec si peu de merite. Et toutesfois vostre bonne volonté pourroit suppléer à ce defaut, si l’amour avoit un peu plus de force en vous. – Je ne vous entends point, me dit-elle, et ne sçay en quoy vous voudriez que mon amour eust plus de force. – O Dieu ! repliquay-je, qu’il sera bien mal-aysé que mes paroles vous fassent entendre à mon advantage, ce que l’amour ne vous a peu faire concevoir. Je veux dire, ma princesse, que si l’amour avoit plus de puissance sur vous, ce devoir que vous m’opposez en aurait beaucoup moins, et que ce trop heureux Valentinian possederoit ce qu’il recherche, et moy ce que je desire. – Ah ! mon chevalier, respondit-