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Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/942

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le bras, et usant de force, il l’y porta, et poussa la porte sur eux.

O Dieux ! courtois Silvandre, quelle devint la pauvre Isidore voyant un tel commencement ! Elle estoit telle, que si elle eust esté conduite au supplice; mais l’Empereur qui pensoit de la vaincre par belles paroles, et qui n’eust jamais pensé qu’une femme luy peust resister, l’ayant assise sur un lict, se mit aupres d’elle, et luy parla de ceste sorte: Je ne fay point de doute, belle Isidore, que vous ne trouviez fort estrange la tromperie que je vous ay faite, et que vous n’en soyez estonnée, et peut-estre courroucée contre moy. Toutesfois, quand vous considererez l’extreme affection que je vous porte, combien elle a continué, et comme il m’a esté impossible de m’en divertir, soit par les raisons que je me suis plusieurs fois, moy-mesme representées, soit par les rigueurs dont vous avez usé contre moy, vous ne trouverez point ceste action si estrange, ny n’en serez point si courroucée contre moy, que prenant pitié d’une personne qui est entierement vostre, vous ne pardonniez cette hardiesse, et me rendiez content avant que de partir d’icy. Toutes choses vous y doivent convier: premierement l’affection que je vous porte, que vous recognoissez bien telle, qu’il n’y a rien qui l’égale; puis la qualité de celuy qui vous ayme, que je ne representeray point autre que vous la sçavez, et qui est telle, qu’estant empereur, vous pouvez aspirer