adoré de tout l’empire, pour mere, Placidie, la plus sage princesse qui fut jamais, et lors qu’esloigné de l’Italie, vous y aviez le moins d’esperance, il vous a suscité un parent, qui vous donnant une sage princesse pour femme, vous a remis un empire pour son dot. Mais Dieu s’est-il contenté de ceste faveur ? Nullement, seigneur, il vous a conduit comme par la main, et mis miraculeusement dans le trosne où vous estes. Il vous a fait vaincre Jean par le jeune Aspar, je dis ce Jean, qui avoit occupé l’empire. Il a fait surmonter ce vaillant Castinus, par ce mesme Artabure, qui peu auparavant estoit prisonnier de Jean, dans Ravenne. Il vous a remis entre les mains ce prudent et sage Patrice Aetiras, par le moien de ceux qui presque ne vous cognoissoient point. Il vous a desfait de ce Boniface, usurpateur de l’Afrique. Il vous a rendu amy depuis naguieres ce redoutable Genseric, roy des Vandales. Bref, que n’a-t’il point fait pour vous, ce grand Dieu dont je vous parle, et quelles graces ne luy devez-vous point rendre ? Or, seigneur, ce mesme Dieu à qui vous avez toutes ces obligations, c’est celuy-là mesme qui maintenant vous voit, et qui regarde quel sujet vous luy donnerez à ce coup de continuer ses graces envers vous, ou bien de vous envoyer des chastimens. Considerez quels miserables accidens, voire tragedies, sont autresfois souvenues
Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/947
Apparence