Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/979

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peuple s’y est-il retiré, que desja ces isles ne paroissent plus isles, mais une grande ville r’atachée par une infinité de ponts, et dont les rues n’ont autre pavé que la mer, y estant accouru de toutes parts tant d’artisans, et tant de grands personnages, que veritablement dés son origine elle se peut dire admirable.

Mais pour revenir à notre discours, apres qu’Attila eut pris Aquilée, et ruiné le pais d’alentour, il s’achemina droit à Rome, et ne faut point douter qu’il ne l’eust prise et saccagée, si Valentinian perdu de courage, ne se fust rendu son tributaire, et ne luy eust accordé sa sœur Honorique pour femme. Mais ceste honteuse paix estant faicte, il se retira en Pannonie, où le soir de ses nopces, outré de viande et de vin, s’estant mis au lict, il fut trouvé mort le lendemain.Les uns disent que ce fut d’une perte de sang par le nez qui le suffoqua, d’autres qu’il fut tué par une de ses femmes ; tant y a que veritablement il mourut la nuict qu’il se maria, delivrant par ce moyen l’empire et de frayeur et de tribut. Valentinian recognut bien en ceste necessité quelle faute il avoit faite d’avoir tué Ætius, ne trouvant capitaine pour opposer à ce barbare, et n’y ayant personne qui se souciast de luy faire service, puisqu’il recompensoit si mal ceux qui luy en avoient rendu le plus.

Quant à moy,j’euss eu honte de me trouver en Italie, qui estoit le lieu de ma naissance, et la voir en telle desolation, sans essayer