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Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/990

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douloir de la fortune, qui m’a laissé assez de vie pour me voir entre les mains de celuy qui me ravit tant injustement des vostres, et que particulierement j’en auray de vous accuser de faute d’affection, si vous ne me tenez mieux parole pue je ne la vous tiens, puis que le desastre le veut ainsi.

Que n’eussé-je point entrepris, si la force eust esgalé ma volonté, ou seulement si mes blesseures me l’eussent permis ! Mais, helas ! j’estois en estat que malaisément eussd-je peu faire mal à autruy, puis qu’il me fut impossible de m’en faire à moy-mesme, lors que, pour ne voir Eudoxe possedée par ce tyran, je voulus me mettre le fer dans l’estomach. Et peut-estre en fin j’y fusse parvenu sans mon cher Olimbre, qui plus soigneux de moy, que je ne vous scaurois dire, s’en prenant garde, m’ostoit toute sorte de moyen de me pouvoir offencer. Et puis me representoit tant de raisons pour me divertir de mon dessein, qu’en fin il me retint en vie, jusques à ce que huict ou dix jours apres ces injustes nopces, je vis entrer dans ma chambre la sage et belle Eudoxe. Elle avoit obtenu ceste permission de Maxime, luy disant qu’il estoit bien raisonnable qu’elle me veid en mon mal, puis que pour la deffendre j’avois esté blessé de ceste sorte. Luy qui la vouloit gagner par la douceur, s’il luy estoit possible, n’avait point de soupçon