Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/994

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donnez-moy vous-mesme fer, que je ne puis si promptement recouvrer, afin que je vous fasse voir que c’est la force, et non la volonté qui me retient en vie apres un si grand outrage.

Elle alors vaincue de ces paroles, et ne pouvant supporter que je les continuasse, s’approchant davantage de moy, me respondit de ceste sorte : Quand vous avez dit qu’il n’y avoit que Valentinian et vous, qui eussiez perdu en ceste miserable fortune, j’ay creu que ne me mettant point du nombre, vous ne m’aimiez plus, puis que je suis celle qui y ay faict la plus grande perte, n’ayant pas seulement esté privée de la personne et de la vie de mon mary, mais de moy-mesme, qui me vois en la possession de celuy, que je hay plus que toutes les choses du monde, qui se doivent le plus hayr. Oyant maintenant le contraire par vos paroles, et sçachant bien que vous avez tousjours esté tres-veritable, je change d’opinion, et ne me dis plus si miserable, puis que je sçay que vous m’aymez encores. Je vous en dirois davantage si je ne craignais que l’on prist garde à mes discours, et seulement je vous veux conjurer par l’amitié que vous me portez, de croire que comme vous estes demeuré par force en vie, que de mesme c’est en despit de moy que je vis aupres de Maxime que je ne tiens non plus que vous faictes pour empereur, mais pour le plus cruel tyran qui fut jamais en Rome. Et si le desir