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Page:Urfé - L’Astrée, Troisième partie, 1631.djvu/716

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le fis exprez, afin que si Rithimer les revoyoit une autre fois, il ne le trouvast pas estrange. Arimant qui sçavoit le bruit qui couroit de l’amour que ce prince me portoit, le voyant fort aymable de sa personne, outre la faveur que sa qualité luy pouvoit acquerir, le regardoit avec un œil qui ne ressentoit point le marchand, et supportoit avec une peine extreme qu’il fallust luy quitter la place, et s’en aller pour ne rien descouvrir. Toutesfois, voyant qu’il le falloit faire par-force, il replia et refit ses bales, et apres les mettant sur son compagnon, apres avoir fait une grande reverence, s’en alla. Et moy, le voyant partir, je luy criay : Adieu, nostre maistre, ne faillez pas de revenir demain au matin.

Voilà quelle fust nostre premiere veue. Mais pour ne tirer ce discours trop en longueur, sçachez, Hylas, que le lendemain il revint lors que chacun estoit allé au temple, et qu’il n’y avoit que Clarine aupres de moy. Et pour ne perdre le temps à redire les mesmes propos que nous nous tinsmes, nostre resolution fut telle : Voyant qu’aussi tost que je serois en estat de marcher, ma mere m’emmeneroit pour me faire espouser par force Clorange, nous fusmes d’avis de la devancer, et que quelques jours avant que de faire cognoistre que je fusse bien remise, je manderois vers Arimant, qui cependant demeureroit vers les Libicins, et que m’habillant en homme, je me desroberois, et m’en viendrois le trouver au logis où alors il logeoit, et que de là