Page:Uzanne - Son altesse la femme.djvu/240

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lui donnait un petit air languissant qui seyait à merveille à sa douce beauté brune et, sous sa robe à l’indolente en tissu rose broché de fleurettes et légèrement décolletée, montrant de jolies maigreurs de jeunesse, elle donnait l’impression vivante, dans ce coin de voiture à :fonds tendu de drap bleu amiral capitonné, d’une coquette et fine marquise du siècle dernier.

La première dînée de la diligence à la table d’hôte commune de l’auberge des relais fut mémorable. Un orage qui menaçait depuis plusieurs heures et apportait un trouble visible dans les nerfs féminins éclatait au dehors. Florval avait promptement installé ses deux voisines qu’il comblait d’attentions ; Mondor portait des toasts, déclamait en parodiant avec emphase les maîtres, faisant des gestes larges, fier des rires qu’il provoquait chez ses compagnes et de l’admiration naïve des deux troupiers, muets de plaisir et béats de surprise. Les servantes, accortes et court-vêtues, faisaient un bruit de vaisselle étourdissant et des chaises de poste, cherchant un abri contre l’ouragan, entraient dans la cour avec des roulements sur le pavage qui semblaient imiter le choc électrique des nuages. Le voyageur de commerce, le sang aux pommettes, l’œil allumé, serrait de près à table Dorimène, la grande ingénue, et comme le tonnerre redoublait, la comédienne aguerrie, repoussant malicieusement son voisin, se mit à