Page:Valéry - Œuvres de Paul Valery, Vol 7, 1937.djvu/141

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problème du prêtre. Stendhal, comme on l’a dit tout à l’heure, le résout sommairement. Sa structure mentale et les développements qu’elle avait nécessairement donnés à ses premières impressions, sa vivacité qui portait ses antipathies à la limite et les exprimait par une formule trop simple pour être vraie, trop claire pour s’appliquer à des hommes, lui font commettre fort aisément une grande confusion de méthodes. Il raisonne sur des prêtres qu’il s’est forgés. Il se met à leur place, il se sent nécessairement fourbe ou bien faible d’esprit. Comme il ne peut s’imaginer leur foi, il ne leur donne que de la crédulité. Comme il sait bien qu’ils ne sont pas tous niaisement crédules, il charge de mensonge, il inculpe de fraude et de simulation ceux qui ne le sont pas.

Mais c’est une erreur évidente, quoique fort répandue, que de prétendre résoudre par de purs raisonnements des problèmes dont les éléments ne se peuvent énumérer ni définir. Il n’y a que des questions de pure algèbre que l’on peut traiter en soi-même et par la tête seule. C’est à l’observation de trancher, quand il s’agit de choses réelles. Qu’il soit possible qu’il y ait des prêtres véritables et riches d’esprit, mon expérience m’en assure. J’en connais, et il me suffit. Je ne dis pas que je me l’explique ; je dis que l’opinion de Stendhal n’a tenu qu’à cet accident qu’il n’en a point connu qui fussent comme les miens.

Voilà comme on se trompe avec le désir d’y voir clair. Cet exemple du jugement des prêtres par Stendhal conduit immédiatement à une remarque générale. La plupart de ceux qui se