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Page:Valbezen - Les Anglais et l’Inde, 1857.djvu/428

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LES ANGLAIS ET L’INDE.

chefs de l’ordre, homme d’un certain âge, aux traits dignes et austères, enveloppé dans les plis d’un magnifique cachemire rouge. Toujours et partout Robespierre en habit bleu barbeau et en culotte de nankin précédant à la fête de l’Être suprême la masse déguenillée des sans — culottes ! Derrière ce dignitaire viennent immédiatement plusieurs chevaux conduits à la main, richement caparaçonnés et destinés à être offerts en présents aux brahmines gardiens des lieux sacrés. Une bande de musiciens armés de monstrueuses trompettes, de féroces tam-tams, d’impitoyables cymbales, marchent fièrement en tête de la masse des baïragees, qui s’avance en un bataillon de plus de trois mille hommes dont les hurlements accompagnent dignement l’infernale symphonie qui les précède. Il faudait le crayon d’un Callot pour donner une idée de ces personnages extravagants avec leurs cheveux épars ou nattés de la façon la plus bizarre, leurs faces tatouées de raies de toutes couleurs, drapés dans des couvertures d’une couleur jaunâtre ou le corps souillé de cendre ! Et cependant le Paris chargé de distribuer la pomme à toutes ces laideurs eût, sans contredit, réservé le choix de ses préférences pour une file de deux cents hommes environ qui, se tenant par la main, marchaient deux à deux processionnellement dans l’état le plus complet de nudité. Jamais l’homme, même au plus chaud d’une orgie de carnaval, même dans les tristes enceintes d’une maison de fous, ne m’a semblé plus laid, plus ridicule que sous les espèces de ces deux cents fakirs, et sans partager les fougueuses