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XIV
INTRODUCTION

Anacréon et Virgile ? À Dieu ne plaise que nous accueillions ici de fâcheux et turbulents folliculaires, rebut de toutes les littératures ! Nous savons ce que le mauvais goût a inspiré çà et là de médiocre ; mais devons-nous rendre responsables Brizeux, Lamartine, Hugo et Mistral des misérables productions de leurs imitateurs ? Nos patois sont-ils coupables de toutes les fausses interprétations de nos Littrés de sous-préfecture qui, sans aucune préparation, nous ont offert des glossaires erronés, véritables monuments de leur sottise ? On dit que ces derniers sont légion, que le Midi, à lui seul, les compte par centaines. Qui l’ignore ? Mais aussi qui songe à s’en émouvoir ? Laissons ces critiques de détail. Laissons aussi le passé pour ce qu’il vaut ; il a donné ses chefs-d’œuvre, et, pour conclure, supputons ce que le présent nous offre et l’avenir nous réserve.

Il est indéniable qu’un retour à la terre, un besoin d’exprimer plus directement ce qui nous environne, se fait sentir. Maniérisme et hermétisme ne sont plus de rigueur. Le poète a délaissé les chambres closes et ouvert sa maison sur les champs. Une forte odeur monte de la terre. Un chant résonne de l’aurore au crépuscule. Un hosanna couvre la plaine du Midi au Septentrion. Immense appel de voix humaines qui répond à l’harmonie universelle des choses. Et c’est une fin merveilleuse, un but lumineusement tracé pour les générations nouvelles, dans un siècle qui commence, après un siècle qui a connu le classicisme agonisant, le romantisme, le parnassisme, le symbolisme, que ce retour à la nature. Là, rien d’artificiel, de forcé. Point de culte exclusif, de christianisme, d’espoir social, etc., mais un panthéisme ardent qui met à sa place dans la création l’homme sans cesse dupé par l’élévation de la pensée, confondant trop souvent ses aspirations et le concept divin.

Tout à l’heure des jeunes hommes sont venus avec un idéal ignoré et ils ont proclamé impérieusement une nouvelle manière d’être. Mais ils se sont égarés. Ce qu’ils ont pris pour l’interprétation du sens rustique n’était en somme qu’un archaïsme de sentiment, un goût très vif pour d’autres hommes qui avant eux avaient exalté la terre. Leur amour du sol, ils le devaient au mirage trom-