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BERRY

Elle te redira les récits d’alentour,
Et les vieux fabliaux de terreur et d’amour.
Là, sous les hauts noyers, près de la chènevière,
Écoute des hameaux l’aïeule filandière :
« Ne passez point, mon fils, si le ciel n’est serein,
Près du pont de Glénis et des Piles d’airain ;
Car c’est là, voyez-vous, (jue de ce roc sauvage
S’élance le sorcier qui monte sur l’orage. »

IV

Sous notre doux soleil, ému par ses rayons,
Viens du barde écossais surpasser les crayons.
Essayer de rapprendre aux pâtres des cabanes
Les noms des Lusignan, des Coucy, des Chabannes,
Vous, surtout, nom si cher au peuple des hameaux,
Jeanne d’Arc, dont le sang teignit ces nobles eaux.
Viens, viens frapper ces flots des éclairs de la lance,
Des accents du clairon peupler le vieux silence ;
Sur ces rocs si longtemps consacrés au repos,
Faire éclater la guerre et flotter les drapeaux.
On verra, des hauteurs de ce Rocher-qui-tremble,
Le vaincu, le vainqueur, lutter, tomber ensemble ;
Et quand des flots sanglants surgira le vainqueur,
Les échos rediront et France et Jacques Cœur.
Heureux, ô du talent puissance que j’envie !
Heureux qui peut, fidèle à son humble patrie,
Lui rendre en des écrits de l’oubli triomphants
Quelque lustre emprunté du nom de ses enfants !

V


Et toi que sur ses bords la Creuse aussi vit naître,
Toi qu’en nous comparant l’amitié voit peut-être
Si divers de pensers, si semblables de cœur,
De soins ambitieux las, victime ou vainqueur,
Qu’un champêtre palais sur ces bords te ramène :
Et tu viendras savoir, visitant mon domaine,
Quels de nos arbrisseaux verdiront les premiers :
À mes pommiers en fleur comparer tes pommiers.
Nous irons de Crozan visiter les décombres ;
Voir, lorsqu’un soleil d’or en percera les ombres,