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BOURGOGNE

 
Par laquelle on voit son tetin,
Et dans la(iuelle elle repousse
Une petite haleine douce,
Qui colore son teinct divin ;

Qu’une gorgère godronnée
Avecque l’empois arreslée
Sur l’escarrure[1], d’un tel soing
Qui montre bien que la personne
Qui tel accoustrement se donne
Pour s’embellir en a besoing.

J’ayme mieux voir sa belle taille,
Sous sa biaude [2] qui luy baille
Cent fois mieux façonné son corps,
Qu’une robe si resserrée,
Qui, par sa contrainte forcée,
Fait jecter l’espaule dehors.

J’ayme mieux voir sa brune face,
Qui, se lavant, point ne s’efface,
Et va tousjours demy riant,
Q’un peint visage de poupine[3]
Qui, d’une desdaigneuse mine,
Ne rit jamais qu’en rechignant.

J’ayme mieux ouyr sa voix bonne
Qui naturellement entonne
Un vaul-de-ville gracieux,
Que ces passions langoureuses,
Aussi feintes comme menteuses,
Que l’on tire d’un gousier creux…

J’ayme mieux voir la simple manche
De sa chemise nette et blanche
Qui laisse en liberté son bras,
Que ces gros manchons de baleine
Dedans lesquels le bras, en peine,
Son libre mouvement n’a pas.

J’ayme miteux voir sa chancelière,
Ses cousleaux, sa jaune tartrière,

  1. Carrure. Sur la poitrine.
  2. Biaude, c’est-à-dire blouse.
  3. Poupée. (Roquef.)