Page:Van Bever - Les Poètes du terroir, t1, Delagrave.djvu/346

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
324
LES POÈTES DU TERROIR

çaise ; et Laure et Pétrarque, un acte en vers, joué à l’Odéon en 1899.

C’est dans ses derniers volumes, et particulièrement Poésies, Les Poèmes de Bourgogne et l’Art sacré, qu’on trouve les pièces de ce poète ayant trait au « terroir ».

« Poète bourguignon et fervent adorateur de son pays natal, a-t-on écrit, c’est à Taisé, près de Chalon, que M. Paté a composé presque toutes ses poésies. La description du pays où se passèrent ses premières années se trouve dans de nombreux passages, empreints de cette mélancolie qui va à l’âme et porte à la rêverie… Il faut citer Le Morvan, Au bord du puits, L’Orbize, les Batteurs de grains, La Veillée des armes, Les Mobiles de la Cûte-d Or et Le Vieux Pécher ; il célèbre les vins fameux, les Grands Crus, esquisse une scène rustique, chante le souvenir d’un compatriote illustre, ou invoque les ombres du moyen âge dans les vieilles églises. Ses paysages bourguignons font rêver aux toiles de Millet et de Jules Breton ; la sincérité des impressions y est relevée par la hauteur de la forme. Ce sont des poèmes réalistes par le choix des sujets, idéalistes par le style. L’air et le soleil y circulent largement, et sur la profondeur des horizons se dessinent des personnages rustiques, qui sortent en relief sous la plume du poète. »

Bibliographie. — Alfr. de Martonne, M. Lucien Pâté ; La France moderne, 14-27 mai 1891.



L’ORBIZE


La rivière est étroite et coule entre des saules
Chevelus comme il sied à des enfants des Gaules ;
Sans eux, on la perdrait parmi les boutons d’or,
Et sans les peupliers, qui de plus loin encor
Trahissent le secret de sa couche fleurie,
On pourrait la chercher longtemps dans la prairie.
Nul bruit ne la révèle, et ce n’est qu’en prêtant
Très attentivement l’oreille qu’on l’entend ;
Encore est-ce de près, et, n’était ce murmure,
On irait droit dans l’eau tout en cueillant la mûre,
Bien heureux si du pied on en touchait le fond,
Car ce flot très étroit est aussi très profond.
Elle sort au couchant, de la roche gercée
Qui fait le vin brûlant et qui rend l’eau glacée,