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BRETAGNE

personne, mais qui n’en demeurent pas moins fort médiocres. François-Séraphique Bertrand, avocat nantais, le trop fameux abbé de La Murre, Sainte-Foix lui-mème, Pierre Ginguené, aw xviiie siècle, comptent parmi ceux-là[1].

En fait, la poésie bretonne, telle qu’on la connaît, date des premieres années du xixe siècle. Que de noms à mentionner si l’on veut être complet ! Elle languit avec François Duault (1757-1833) ; Théopbhile-Marie Laënnec (1747-1836) ; Jean-Marie de Penguern (1776-1843) ; Edouard Mennechet (1794-1845) ; Ernest Fouinet (1799-1845) ; Dubois de Bcauchesne (1802-1890) : Eugène Lambert (1803-1879) ; Achille du Clésieux (1806-1893) ; Raymond du Doré (1807-1893) ; Pontavice de Heussey (1814-?) ; l’infortuné Auguste Le Bras (1816-1830) ; Charles Alexandre (1821-1871) Robinot-Bertrand (1833-1885), etc., vingt autres encore qu’on trouvera plus loin, et ne prend son essor qu’avec les romantiques et ces derniers venus : Louis Tiercelin, Anatole Le Braz, Tristan Corbière, Charles Le Goffic, etc.

Depuis la publication du Parnasse breton contemporain[2], lequel devait marquer une étape et réaliser les ressources d’une génération impatiente de se produire, elle s’est peu renouvelée, ce qui revient à dire qu’elle n’a pris qu’une faible revanche sur un passé médiocre et qu’elle a dédaigné tout brevet d’originalité. Aussi bien est-ce une chose singulière à observer que sa monotonie et la tristesse de son expression, où domine une étroite formule mystique. C’est à croire qu’elle n’a rien connu de toutes nos angoisses littéraires, et que des clichés lui suffirent pour transmettre ses joics et ses douleurs, sa résignation et son espoir. Cette insensibilité, ou plutôt cette indigence, étonne et déconcerte. Pourtant son sol est divers, impressionnant à l’exces. Il autorise toutes les audaces. Ah ! qui nous donnera le grand poète de ces landes solitaires, de ce sol de granit, de ces côtes rocheuses où tous les paysages se confondent, où tous les éléments se heurtent et se combinent sous la voix formidable de l’Océan[3] ?

  1. Nous avons exclu de cette courte liste le comte de la Touraille, auteur de ce livre plaisant : Nouveau Recueil de gaiets et de philosophie, par un gentilhomme retiré du monde (Londres et Paris, Belin, 1785, in-12). Ce fut un esprit singulier.
  2. Le Parnasse breton contemporain, par Louis Ticreclin et J.-Guy Ropartz ; Paris, Lemerre, 1889, in-8o.
  3. Et pourtant ils sont légion, les poètes récents de la Bretagne ! Leur nombre est illimité. Quelques noms s’imposent parmi les « oubliés ». Citons, au hasard du souvenir : Émile Boissier, Jean Flémeur, Henri Droniou. Frédéric Blin, Hugues Rebell, J.-B. Illio, Raoul de la Grasserie, Fleuriot-Kérinou, Yann Nibor, Louis Marselleau, Armand Davot, Louis Ernault, Camille Lemercier d’Erm. etc., ete. Enfin, n’omettons point, parmi ceux d’hier, Charles Monselet, et ce glorieux