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LES POÈTES DU TERROIR

Evariste Boulay-Paty, ajouterons-nous, fut un écrivain inégal et dépourvu d’esprit critique ; aussi n’a-t-il mérité ni les éloges excessifs que lui ont décernés quelques-uns de ses admirateurs, ni l’oubli dans lequel on le tient. Peut-être fera-t-on un jour une place équitable à ce peintre pittoresque de la vie rustique, en Bretagne, au début du xixe siècle.

Bibliographie. — Sainte-Beuve, Nouveaux Lundis, t. X, etc. — Dominique Caillé, Un Romantique de la première heure, Év. Boulay-Paty, son Journal intime et sa Correspondance, 1829-1831 ; Paris, G. Ficker, 1907, in-8o ; La Poésie a Nantes, sous le second empire ; Tours, Bousrez, 1905, in-8o. — J. Rousse, La Poésie bretonne au dix-neuvieme siècle ; Paris, Lethielleux, 1895, in-8o.


ÉLÉGIE


… Oh ! qui me rendra donc mon pays adoré !
Comme je le regrette ! Oh ! j’ai le cœur navré !…
Je revois les lieux chers de mon pays, la côte,
Où j’allais, livre en main, pêcher, à la mer haute,
La chevrette de Loire en mon grand carrelet ;
Où la seine attirait la sole et le mulet ;
Où, quand venait le froid, sur les vases polies,
À mer basse, j’allais tendre ma ligne aux plies.
Je revois les bourlans où la fleur jaune était,
Où, leste et vif, gaiement le roitelet sautait ;
Les fossés de gazons où la rosée en perles
S’égrenait sous les pieds ; la vigne où les beaux merles
Sifflaient sous les osiers ; le vivier recouvert
De lentilles formant son joli manteau vert ;
Le jardin du verger, que tapissait la fraise ;
La prée où l’on dansait aux doux sons de la vèse,
Ou bien aux anciens chants des rondes du pays ;
Et les toits de roseaux qu’ont les maisons ; et puis
Notre banc du portail d’où j’aimais sur la lame
À voir passer les blins à la voile, à la rame,
D’où j’entendais sonner par le sableux sentier
La cloche des mulets du joyeux paludier.
Par son bruit en septembre annonçant la sardine,
Qui gonflait sur le gril et qu’on mangeait divine.
Je vois nos paysans, aux cheveux plats et longs,