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LES POÈTES DU TERROIR

quos… Tristan Corbière est unique en Bretagne. Il renouvelle, pour notre joie, l’art appauvri, exsangue et faussement mystique du romantisme agonisant…

Les Amours jaunes ont été réimprimés en 1891, par Léon Vanier.

Bibliographie. — René Martineau, Tristan Corbière, essai de biographie et de bibliographie, etc. ; Soc. du Mercure de France, 1904, in-18. — Ad. van Bever et P. Léautaud, Poètes d’aujourd’hui, nouv.  édit., Paris, Soc. du Mercure de France, 1908, I.



LA FIN


Oh ! combien de marins, combien de capitaines
Qui sont partis joyeux pour des courses lointaines
Dans ce morne horizon se sont évanouis ?

. . . . . . . . . . . . . . . . . .


Combien de patrons morts avec leurs équipages !
L’Océan de leur vie a pris toutes les pages,
Et, d’un souffle, il a tout dispersé sur les flots.
Nul ne saura leur fin dans l’abime plongée…

. . . . . . . . . . . . . . . . . .


Nul ne saura leur nom, pas même l’humble pierre
Dans l’étroit cimetière où l’écho nous répond.
Pas même un saule vert qui s’effeuille à l’automne,
Pas même la chanson plaintive et monotone
D’un aveugle qui chante à l’angle d’un vieux pont.

(V. Hugo, Oceano nox.)


Eh bien, tous ces marins, — matelots, capitaines,
Dans leur grand Océan à jamais engloutis…
Partis insoucieux pour leurs courses lointaines,
Sont morts — absolument comme ils étaient partis.

Allons ! c’est leur métier ; ils sont morts dans leurs bottes :
Leur boujaron[1] au cœur, tout vifs dans leurs capotes…
— Morts… Merci : la Camarde a pas le pied marin ;
Qu’elle couche avec vous : c’est votre bonne femme…
— Eux, allons donc : Entiers ! enlevés par la lame,
Ou perdus dans un grain…

Un grain… est-ce la mort, ça ? La basse voilure
Battant à travers l’eau ! — Ça se dit encombrer

  1. Boujaron, ration d’eau-de-vie.