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Page:Van Bever - Les Poètes du terroir, t1, Delagrave.djvu/478

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LES POÈTES DU TERROIR

Et Jeanne Madec à cette heure
Berce un enfant sur ses genoux.

Ne passez pas par la rivière,
Le meunier Le Goff est malin,
Et, si vous voulez rester fière,
Évitez les gens du moulin.

Écoutez, Yvonne la folle !
Écoutez… Appels superflus !
La jupe court, la coiffe vole !
Vieux père, on ne t’écoute plus !

Yvonne, écoutez ! Sainte Vierge,
Où court-elle ainsi de ce pas ?
La voilà qui descend la berge,
Et la voilà qui roule en bas.

Alors le vieux Kemener crie :
— Meunier, meunier, prends ton bateau !
Je crains un malheur, je t’en prie !
Yvonne Ann Dû se jette à l’eau !

Et Le Goff ouvre la fenêtre…
— Allons, meunier de Pratannor,
Descends, il en est temps peut-être ;
On pourrait la sauver encor…

— Non, tailleur, le courant l’emporte !
Va dire au Comte en sa maison
D’aller, ce soir, pêcher la morte
Dans son étang de Kersauzon.


LES TROIS AIGLES


D’argent à l’aigle éployée de sable,

becquée de gueules, couronnée d’or.

Armes successives des Guesclin.)
I


L’aigle est noire !… L’Anglais est vainqueur à Crécy
Et l’Anglais est vainqueur à Poitiers… Quelle honte
Pèse sur le pays et quelle clameur monte
De ce sol ravagé jusqu’au ciel obscurci !

Donc la France agonise, et nul n’en a souci !
Pas un vilain ne mord cette main qui le dompte,