Vivez, arbres aimés depuis ma tendre enfance,
Arbres deux fois sacrés, par l’âge et la beauté !
Esprits, autour de vous tracez une défense !
Gardez votre logis sous l’écorce abrité !…
Mon âme aura toujours, pour les choses antiques,
Un amour qui tient tout mon pays à la fois :
Vieux bois et vieux granits des vieux âges celtiques,
Reliques des aïeux nous parlant d’autrefois.
Si l’Ankou dans un coin de la lande me guette,
Que l’on m’y trouve, un soir, comme un fantôme blanc,
Avec un dernier ton de chêne à ma palette,
Un dernier vers d’amour sur mon album tremblant.
Vous qui me garderez ma place dans la terre,
N’y mettez pas de marbre avec son piédestal :
Je ne veux, pour orner mon tertre solitaire,
Que la pierre et les fleurs de mon pays natal.