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LES POÈTES DU TERROIR

À l’église du bourg une cloche a tinté.
On ne sait si c’est un songe…
Le tintement se prolonge,
Les vitraux dans leur châssis
Tremblent !… Morte est la résine…
À quelque porte voisine
Quelque malheur s’est assis.


Mais la vieille qui toujours file
Semble n’avoir rien entendu,
Et, comme une araignée agile.
Son doigt, le long du fil fragile.
Tantôt court, et tantôt demeure suspendu.

… « Tourne, mon rouet, tourne encore !

« Flocons de lin couleur d’aurore
Qu’on blanchira de fin savon,
Vous serez l’aube de lumière
Qu’au jour de sa messe première
Revêtir messire Yvon ! »


C’est un chant grave, un chant austère,
Que le chant du rouet… Il dit :
« Je sais un toit de presbytère
Où la mousse triste verdit.

« Il est aussi vieux que la crèche.
Que le toit de chaume effondré
Où, sur un lit de paille fraîche,
Jésus, en naissant, a pleuré.

« L’église porte comme un cierge,
Comme un cierge en pierre, sa tour.
Près du Calvaire est une Vierge,
Et des tombes sont à l’entour.

« Des tombes partout, et des tombes !
Des os pourrissent au charnier…
— Que de pigeons et de colombes
Ont déserté le pigeonnier !… »