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BRETAGNE

Bercent l’immense horizon gris
À leurs frissons d’orgues vivantes.

(Tryphina Keranglaz.)


ENTRE PLOMEUR ET PLOVAX


Les âpres Bigoudenn aux formes d’Androgynes
Ont dans leurs yeux, figés comme l’eau des étangs,
L’inquiétante nuit des longues origines,
Le mystère qui dort au fond lointain des temps.

Frustes, l’air incomplet des idoles barbares.
Dans leurs vêtements lourds qui tombent à plis morts,
Le long du pays maigre et des côtes avares,
Rôdent les Bigoudenn, les filles aux grands corps.
 
À leurs corsages plats ont fleuri des fleurs jaunes,
Des mousses de menhirs, des lichens aux tons roux ;
Et leurs yeux sans regard, leurs yeux fixes d’icônes,
Naïvement cruels, sont servilement doux.

Brùleuses de varechs et pilleuses d’épaves,
Leur rêve paît au loin la grise immensité.
Et leur troupeau, vautré dans les horizons graves.
Sur le grand pays morne a l’air d’être sculpté.

(La Chanson de la Bretagne.)


À QUIMPERLÉ
I

Elle est vieille et vaste, la chambre.
Le lit de passage où je dors
A, ce soir de premier novembre,
Je ne sais quoi qui sent les morts.

Les rideaux, d’attitude roide,
Descendent à plis empesés,
Et des souffles de tombe froide
Rampent le long des draps glacés.

La pendule, verte de mousse,
Tinte des heures d’autrefois ;