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LES POÈTES DU TERROIR

On dirait une voix qui tousse
Pour faire taire d’autres voix.

Et c’est bientôt un grand silence,
Un silence lourd et profond
Où, dans le vide, se balance
Une ombre accrochée au plafond.

La chambre est vieille, vaste, haute…
Ce soir, si j’ai bien entendu,
Les gens contaient à table d’hôte
Une aventure de pendu…

II


Comme en un sursaut d’épouvante
L’âme des meubles a gémi…
On vient d’entrer… c’est la servante :
— Doux maître, avez-vous bien dormi ?

Elle fait claquer les persiennes,
Et l’aube du jour automnal
Met sur les choses anciennes
Son blanc sourire virginal.

Et, dans la chambre, vieille et vaste,
Mon cœur se ranime, frôlé
Par cette odeur de pays chaste
Qui se respire à Quimperlé.

Leau gazouille dans les rivières ;
Des cloches tintent aux moustoirs.
Et le caquet des lavandières
Semble mousser sous les battoirs.

Sur la pointe du pied dressée,
La fille, au dehors se penchant,
Jette à quelqu’un, par la croisée,
Son breton rythmé comme un chant.

Breton joli des Quimperloises,
Qui de leurs lèvres, grain à grain,
En perles fines, en turquoises.
S’égrène ainsi que d’un écrin.

Et tandis que la belle épanche
Son parler clair, si doux, si lent,