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LES POÈTES DU TERROIR

Ouvrage d’Alcimedon,
Appuyé sur mon pupitre
Je te trace cette Epistre,
Pour t’apprendre en peu de mots
Et ma joye et mon repos.

Icy dans ma Solitude,
Je vis sans inquiétude.
Le dessein ambitieux
De plaire à nos Demi-Dieux,
D’estre chéri des Puissances ;
De posséder les Sciences ;
L’ardent désir des honneurs ;
Le vain espoir des grandeurs,
Ni les assauts de l’Envie
Ne tourmentent point ma vie.

Tout rit en ces lieux charmans :
Nos superbes bastimens ;
Nos prez, nos bois, nos montagnes,
Nos vallons et nos campagnes.
Philomèle seulement
Y soupire son tourment,
Et fait de sa voix plaintive
Partout retentir la Rive.
Les Jeux, les Grâces, l’Amour,
Sans cesse y font leur séjour.
Venus y tient son empire.
Chaque Iris a son Tityre.
Les moins sensibles plaisirs
Y surpassent les désirs :
Et sur les vertes fougères
Les Bergers et les Bergères
Ressentant également
D’amour l’aimable tourment,
Représentent la Contrée
De Céladon et d’Astrée.

Tant de plaisirs innocens,
Qui ravissent tous les sens,
Ont rallumé dans mon âme
La belle et céleste flame
Dont, en l’Avril de mes jours,